A l’origine de ce projet, un homme, Didier Spade, qui a fait le pari de faire renaitre ce fleuron de technologie et de savoir-faire national qu’est le mythique paquebot France.
Didier, PDG de l’entreprise Seine Alliance, a bien voulu faire une parenthèse dans ses activités pour nous accorder une interview sur la genèse et le développement de son projet.
L’histoire du paquebot France et de Didier Spade, sont étroitement liées.
En effet, son grand-père, Baptistin Spade, était l’un des grands noms de l’aménagement de paquebots au début du XXème siècle.
Tapissier-décorateur de formation, il travailla pour les principaux armateurs de l’époque. Il œuvra à l’aménagement intérieur d’une trentaine de paquebots, incluant le très célèbre Le Normandie. Outre le mobilier et la décoration intérieure, il accorde un souci particulier à l’aménagement et l’organisation de l’espace. Le mobilier est ainsi mis en valeur par les tapisseries et tapis (dont il dessine les maquettes) et les luminaires.
Baptistin Spade terminera sa carrière avec l’aménagement du paquebot France, réalisant, entre autres, la descente des 1ères classes. Il cèdera son entreprise à ses fils, Pierre et Georges.
L’histoire maritime et celle des grands paquebots ont baigné l’enfance de Didier Spade. Cet amour pour la navigation l’a conduit à fonder des entreprises autour du tourisme fluvial.
En 1990, il crée une entreprise évènementielle haut de gamme avec une flotte de bateaux à roue à aube en Région Parisienne.
Il revend cette société après quelques années pour se tourner vers une cible de yachts et lance ainsi le « Clipper Paris » construit à Saint-Nazaire.
Il dispose aujourd’hui d’une flotte axée sur l’écologie puisqu’une partie croissante de celle-ci est mue par propulsion « zéro émission » grâce à des moteurs électriques alimentés par des batteries de véhicules électriques recyclées.
Pas de problème d’autonomie puisque les navigations n’excèdent pas 2 heures, et que la recharge s’effectue de retour au port.
La naissance du projet du Nouveau Paquebot France
Lors du démantèlement du dernier France en 2007, Didier Spade fait le constat qu’il manque aujourd’hui un ambassadeur de la France en termes d’arts décoratifs, de gastronomie et de savoir-faire des créateurs français.
Un ambassadeur itinérant comme l’était le France ou le Normandie, ou plus récemment le Concorde.
L’idée de construire un navire très moderne, différenciant et innovant émerge alors.
Dès les prémices du projet, Didier Spade souhaite créer un paquebot à faible émission carbone, avec un nombre de passagers réduits, à l’inverse de la tendance au gigantisme des croisières classiques.
Fort de l’expérience acquise grâce à sa flotte fluviale, le projet se tourne naturellement vers un mix énergétique avec des carburants faiblement polluants, notamment le GTL (Gaz To Liquid), couplé à un système de batteries offrant suffisamment d’autonomie pour les manœuvres au port avant branchement sur secteur à quai.
Un des principaux facteurs de pollution des navires est causé par le choix de la vitesse de croisière autour de 20 nœuds. Plus un navire va vite, plus il va brûler de carburant.
C’est pourquoi Didier a choisi de réduire la vitesse de son « France » autour de 13 nœuds, il pourra ainsi diviser par trois la consommation de carburant. Ce choix de vitesse de croisière va également, en réduisant l’effet du vent sur les passagers, leur apporter un meilleur confort.
Dans le mix énergétique imaginé pour le Nouveau France, Didier a également pensé au soleil et le vent. Une utilisation du solaire permettrait en effet, à minima, de subvenir à l’ensemble de l’éclairage à bord. Concernant l’éolien, le chef d’entreprise a évoqué un possible partenariat une entreprise développant des « voiles de Kite » pour navire. Déjà usité sur plusieurs projets, ces voiles permettraient une économie de carburant de l’ordre de 10 à 20 % selon les conditions de vent.
L’impact de la crise sanitaire actuelle sur le projet du Nouveau France
« Aujourd’hui le marché des croisières est encore très malmené » souligne Didier Spade. Il est vrai que l’image de la croisière a fortement été impactée au début de la crise sanitaire avec les récits de centaines de passagers bloqués à bord, se voyant refuser leur débarquement de port en port.
« L’avenir du tourisme en général reste incertain et avec peu de visibilité concernant les habitudes de voyages. Cependant, il paraît évident que ceux qui s’en sortiront sont les bateaux à plus faible capacité de passagers », analyse le croisiériste.
« Les gens apprécient de moins en moins les navires de croisières qui sont devenues pour certains, de véritables villes flottantes. Rappelons aussi, poursuit Didier, que les plus petits bateaux peuvent accéder aisément aux petits ports, contrairement aux gros paquebots, ce qui, en termes d’agrément, constitue un net avantage.
Le nouveau France sera donc définitivement à taille humaine.
Comment le nouveau a fait revivre l'ancien France La collaboration entre Didier Spade et Beview a contribué à affirmer notre expérience dans la reconstitution de modèle 3D historique. Après ceux du château de Versailles, ce sont les plans 3D du mythique paquebot France qui ont émergés de notre agence. Ces derniers ont été entièrement reconstitués d’après illustrations d’époque et plan papiers. Beview a de nouveau fait naviguer le France, du moins virtuellement, pour les besoins de deux documentaires pour France 5 et RMC découverte.
|
Plusieurs scénarii ont fait évoluer le projet au fil du temps, celui-ci étant, comme à ses débuts, toujours plus moderne et tourné vers un respect de l’environnement. Hasard du calendrier, l’exigence apportée à la conception du navire, rejoint à présent les nouvelles contraintes sanitaires.
Par exemple, dès l’initiative du projet, un système de climatisation et de traitement de l’air individuel est prévu. Une idée qui pouvait paraitre saugrenue à l’époque mais apparait finalement visionnaire et avant-gardiste aujourd’hui.
Enfin, le projet de mise en valeur de la Gastronomie Française est toujours à l’ordre du jour. Les couleurs de celle-ci devraient être portées par le Chef multi-étoilé Alain Ducasse, artisan du bien manger et du bien vivre, qui porte un intérêt tout particulier à la scénographie et aux arts de la table.
L’objectif de lancement initial était 2024, année des Jeux Olympiques à Paris.
Le projet est toujours viable aujourd’hui et toujours dans les starting-blocks, mais il est moins aisé de faire des prévisions précises. La phase de levée de fonds, par exemple, a dû être décalée.
Didier Spade conclura l’interview par cette phrase « les Grands Projets prennent du temps : il faut être tenace et persévérant ».
Pour notre part, nous ajouterons que nous avons hâte de voir ce projet innovant et respectueux de l’environnement voguer sur les mers.